DON QUIXOTE - n. p.

(El ingenioso hidalgo don Quixote de la Mancha)

Roman de l’écrivain espagnol Miguel de Cervantes, Don Quichotte est l’un des classiques les plus lus de la littérature occidentale. Conçu à l’origine comme un pastiche des romans de chevalerie en vogue au Moyen Âge, il raconte les aventures d’un gentilhomme qui, à force de lecture, se prend pour un chevalier errant et part, accompagné du cupide Sancho Panza, à travers l’Espagne du XVIIe siècle en quête d’aventures fantastiques.

DON QUIXOTE

Argile et acier
61 x 34 x 20 cm
2019

« Les mutilations aussi ont leur style » écrit Malraux à propos de la beauté des œuvres que le temps transmute. Dans cette sculpture du chevalier à la triste figure, j’ai voulu saisir la poésie de l’entropie à travers l’usage d’une matière érodée et lacunaire. Le buste, d’une riche couleur rouille, est en terre de grès chamottée crue, réalisé dans un style esquissé qui donne à la surface l’allure d’un vestige rongé par le temps. Intentionnellement conçu en non finito, ce buste lacunaire est présenté en équilibre sur la fine tige d’acier blanc d’un socle tranchant radicalement avec son aspect altéré et lui donnant l’impression de léviter.

Choisir Don Quichotte comme modèle, c’est aborder le sujet de l’idéalisme romanesque : l’idéal chevaleresque, l’idéal vertueux, la nostalgie d’un monde que l’on n’a pas connu, le fantasme idéalisé d’un passé qui n’a jamais existé, le récit personnel par lequel on fictionnalise la réalité.

Dans le roman de Cervantes, le décalage entre le monde dont témoigne Sancho et le récit fantastique qu’en fait Don Quichotte est source de comique de situation, mais pour ma part j’y vois plus une tragédie. La tragédie d’un romantique idéaliste qui joue au chevalier comme un enfant en quête de panache et de justice dans un monde moderne démystifié. Ses rêves de fantaisie idéale se heurtent à la dure et râpeuse réalité, ce qui en fait un perdant magnifique, grand dans la défaite et qui jamais n’abandonne. Mais, chassant les « enchanteurs » qui altèrent la réalité de leurs illusions, son retour à la raison entraîne in fine la mort du rêveur, redevenu un vieil homme triste et seul.