PAYSAGE - n. m.

(de pays )

  1. Étendue spatiale, naturelle ou transformée par l’homme, qui présente une certaine identité visuelle ou fonctionnelle : paysage forestier, urbain, industriel.
  2. Vue d’ensemble que l’on a d’un point donné
  3. Aspect d’ensemble que présente une situation : Le paysage politique du pays.
  4. Peinture, gravure ou dessin dont le sujet principal est la représentation d’un site naturel, rural ou urbain.
  5. Un des types (intermédiaire) de format des châssis pour tableaux.

PAYSAGES

série photo
2022 – aujourd’hui

La photographie est un médium paradoxal qui, s’il a à voir avec la réalité et le temps, porte en lui la puissance évocatrice capable d’altérer sa propre essence.

La collection des Paysages est avant tout un travail d’atmosphère dont la nature contemplative se traduit par la taille monumentale de mes toiles. Je parle plus volontiers de toiles à leur propos car dans mon approche de l’image, je considère la photographie comme l’extension de la peinture et, à vrai dire, ma méthode n’est pas si différente de celle de mes aïeux. Je trouve mes sujets lors de mes voyages. Toujours accompagné de mon appareil photo, je marche, je roule et j’explore le quotidien à l’affût de lieux susceptibles de contenir en eux la puissance évocatrice nécessaire pour y faire éclore spontanément le récit. Le plus souvent je ne trouve rien, mais parfois il arrive que mon attention soit attirée par quelque chose. Cela peut être une ruine ou un lieu désert, une structure remarquable ou un endroit empreint d’une étrange familiarité, une lumière, une atmosphère, une silhouette, mais il y aura toujours la présence du vide. Le vide est une dimension importante dans mes paysages car plutôt que d’y raconter une histoire, j’aime à la suggérer. Le vide, ce n’est pas le néant, c’est l’inconnu que l’esprit humain s’empresse de remplir avec les rêves, les souvenirs et les histoires qui l’habitent comme une lanterne projetant sa propre ombre, étendue et déformée. C’est ce qui vit sous les lits d’enfance et dans les terra incognita. C’est le fantasme, l’espoir et l’angoisse, c’est ce qui nous précède, c’est ce qui nous succède, c’est le mystère qui nous dépasse. Ainsi, face à mes paysages à la temporalité incertaine, le spectateur se retrouve devant une énigme laissant la part belle non pas à ce qui est contenu dans le cadre, mais à l’inconnu qui se tapit au-delà, dans l’immensité insondable de son paysage intérieur.

À titre personnel, le récit que j’y projette est celui d’un monde post-humain. Sans que cela ne soit pleinement conscient, la juxtaposition dans cette collection d’un paysage naturel altéré par la présence humaine ou d’un paysage humain dans lequel resurgit la force naturelle est systématique. De plus, la présence humaine y est toujours implicite et indirecte, se manifestant uniquement par sa trace et son écho. Cela me renvoie à mon imaginaire d’adolescence nourri par Stalker, Le Dernier Combat, Koyaanisqatsi et mes longues phases contemplatives où je m’imaginais dernier spectateur d’un monde inhabité dont l’histoire s’était achevée bien avant moi. Ainsi, je pense que malgré ma volonté de créer des toiles intemporelles, ce travail contient en lui au contraire une image de son époque où notre monde, comme notre conception de celui-ci, est en proie à des bouleversements profonds dont on ne parvient pas encore à saisir pleinement la portée.